Georges Mandel L’oublié
du Panthéon ?
Jean
Zay au Panthéon. On ne saurait que s’en réjouir. Il n’empêche. On ne peut
oublier un autre que l’histoire, toujours injuste, a oublié:
Georges Mandel, lui, que certains, aux lendemains de la Libération,
promettaient au Panthéon. Jamais cela ne fût. Certes, Mandel, qui fut lui aussi
ministre d’un gouvernement du Front populaire, était un homme de droite.
Serait-ce là, après tout, le motif de tant d’injustice ? En
1943, Émile Buré, qui avait dû lui-même s’exiler au Canada,
écrivait dans un journal canadien « Ce serait par trop affreux vraiment de
voir disparaître avant la victoire celui qui n’en désespéra jamais, celui qui
lui consentit le sacrifice de sa vie, sans exhaler jamais la moindre plainte.
Aux grands hommes la patrie reconnaissante. Nous conduirons Georges Mandela au
Panthéon à notre retour. » Mais au retour, on le sait, il n’y eut rien. En
1994, Nicolas Sarkozy avait promis à Claude Mandel (c’est elle qui me l’a dit)
que si un jour il avait le bonheur de parvenir à la tête de l’exécutif,
il ferait entrer les cendres de Georges Mandela au Panthéon. On sait ce qu’il
en fut. En 1996, j’avais moi-même demandé au gouvernement Jospin de décider du
transfert des cendres de Georges Mandela sur la Montagne Sainte-Geneviève. En
vain. Dont
acte, demain, Jean Zay, lui y sera et il n’y a rien à dire. Il fait partie des
11 parlementaires assassinés entre 1940 et 1944 au côté notamment de
Gabriel Péri, de Marx Dormoy et de Georges Mandel. La décence interdit de
distinguer entre les sacrifices. Toutes celles comme tous ceux qui ont versé leur
sang sont égaux à jamais dans notre souvenir est dans notre reconnaissance.
Et pourtant… Certes,
il serait malséant de se livrer à quelques comparaisons que ce soit. Les
victimes de la milice sont égales dans le supplice. Pourtant, si l’on analyse
ce qu’a pu faire Mandel pour la France de 1917 à 1944, il n’est pas sûr qu’une
comparaison objective tourne en sa défaveur. En une année où l’on prétend
célébrer officiellement le centenaire de la guerre 1914 – 1918, comment oublier
que lui, Georges Mandel, à l’âge de 32 ans, à jouer les premiers rôles
aux côtés de Clémenceau, pour tenir à bout de bras la France déjà
envahie, aux heures les plus terribles de 1918, pour l’amener jusqu’à la
victoire. Un siècle déjà ! Ces services rendus à la patrie sont sans doute trop
anciens. Le regard de l’histoire a changé. Pour la suite, laissons la parole au
général De Gaulle: « Il avait entre les deux guerres exercé l’action
nationale, ferme et républicain. Au moment du grand drame, lui n’a pas fléchi,
il a fait son devoir et porter sa responsabilité, il en est mort, il est mort
pour la France ». Non, au moment du grand drame, lui n’a pas
fléchi… Sic transit Gloria Mundi ! Est-ce que, Georges Mandela paiera
longtemps le tribut posthume d’avoir eu Nicolas Sarkozy comme biographe ? Bertrand Favreau |